On parle beaucoup de « l’Après Charlie », de l’avenir du journal, des questions de Liberté d’Expression et d’auto-censure qui se posent aujourd’hui, à plus d’un, de la façon d’aborder aujourd’hui le dessin de presse, la caricature, le risque que cela peut impliquer, de la nécessité de continuer sur la même voie ou peut-être de s’arrêter un instant pour y réfléchir… L’insouciance a pris du plomb dans la tête, le rire est forcément plus grave, ou plus prudent.
« L’après Charlie « …
J’aimerais tant pouvoir parler de « l’Avant Charlie », l’avant 7 janvier, retrouver une effluve d’insouciance, justement, de légèreté, de connerie, tout simplement.
Deux hommes bardés de noir et de folie sont passés, trois avec leur triste comparse de mort, et rien n’est plus pareil, rien ne peut être pareil.
L’élan qui s’en est suivi fut un élan du coeur, des coeurs sur une même longueur d’ondes. Je les ai croisés, ces visages inconnus de mes frères et soeurs humains, inconnus mais familiers, dans une même communion, un même besoin de nous retrouver ensemble, silencieux, stupéfaits, comme groggy d’avoir trop manqué d’air ou de lumière. Le souffle coupé. Un instant, sans doute, un court instant…
Bien sûr, certains ne s’y sont pas reconnus, peur d’être récupérés, manipulés, peur d’être dans la masse « bêlante » des moutons, eux à qui on ne la fait pas. Pas dupes. Mais n’est-ce pas une posture aussi, que de n’être pas Charlie ? Le choix, heureusement, appartient à chacun.
Je fus Charlie. Pour cet instant là.
A vous que j’ai croisés dans la foule, à vous qui vous êtes laissé porter par cet élan, cette vague, cette évidence d’être ensemble, pour une fois, sans se soucier des différences, des malentendus ou des querelles d’hier, à vous qui vous êtes regardés, avec amitié, avec empathie, avec le sentiment d’appartenir à une même famille sous le même nom de Charlie, j’ai envie de dire ma reconnaissance et mon affection. Voyez comme c’est possible, un instant, une journée, une semaine peut-être. Oublieux de ce qui nous sépare et nous différencie, juste unis dans la même émotion.
C’est possible. Il ne tient qu’à nous. Et sans attendre le prochain coup, la prochaine sidération de violence, le prochain impact. C’est possible, au quotidien.
Frères humains, but de ma course, comme chantait Nougaro… C’est possible, il suffit de se laisser porter, sans écouter la peur, sans lui donner de prise.
Je vous attends.
Comme toujours, matiere à réflexion.
L’esprit charlie, hier, s’est retrouvé dans les bouchons, chacun dans sa coque, sous la neige. À cause de la neige.
Il faut toujours un évênement extérieur au groupe pour que l’esprit grégaire fonctionne et donne un sentiment de solidarité; comme les moutons.
Apprenons la chanson de Baden Powell chantée par Nougaro « donne moi la main…nous avons cinq doigts aussi.
Apprenons la surtout à nos enfants, il n’est pas encore tard.
Le monde ne peut pas aller mal, puisqu’on continue à flatter le cul des vaches.
Un sacré réveil! Merci. Vous êtes le porte-voix de ma conscience endormie.
❤
Oui c’est cela : l’espace d’un (court) instant, « être Charlie » « sans se soucier – pour une fois – des différences, des malentendus, des querelles d’hier » et savoir que c’est possible : « il ne tient qu’à nous ».
Savoir qu’on en est capable, peu importe le temps que cela dure du moment qu’on en est capable, chacun, et éprouver cette évidence d’être ensemble, par instants, même si l’on sait en même temps qu’il y a eu ceux qui ne s’y sont pas reconnus, qui ont eu peur d’être « récupérés, manipulés,… » ou qui jugent « bêlants » ceux qui ont partagé ce moment.
Ah, monde où il devenu si difficile de vivre ses émotions sans que cela passe pour une démission de la raison (critique, de la raison critique, c’est important). Ben oui, c’est comme ça… « et je vous merde » comme disait Coluche… (quitte à le faire avec amour, d’ailleurs) !
Magnifique Maître
C’est vrai que l’être humain (toutes couleurs confondues) n’est qu’une seule et même espèce. Alors combattons ensemble ceux qui prétendent le contraire. Nous sommes Charlie et laissons personne dire le contraire!!!
« Je vous attends. »
Je vous rejoins 😉 Merci infiniment pour ce texte.
François
Bise
🙂
Je suis là. Autour de moi, depuis des années, je parle de vous, et de votre trait incisif, mais juste, de vous et de votre esprit incisif , mais juste (la plupart du temps)…Autour de moi, j’interviens quand je lis/entends des affirmations à l’emporte-pièce, à l’aune des idées reçues, et je pose mes questions, parfois sans attendre de réponse.
Poser. Juste pour faire réfléchir.
Nous sommes là.
Nous sommes quelques uns, et oui, j’ai reconnu « la famille » des poseurs de questions dans les attroupements « bêlants » de gens qui avaient besoin de se serrer les uns contre les autres, de se rassurer, de voir qu’ils n’étaient pas seuls à croire en une certaine forme de liberté.
J’ai eu un père qui m’a appris la tolérance, malgré son séjour dans les geôles de certain pays de l’ex-bloc de l’ Est, et croyez moi, c’est une leçon qui ne s’oublie pas.
Montrer l’absurde, poser des questions. Inlassablement.
Merci Maester.
Je n’attendais rien de moins de votre part Maître
Un Grand Merci
C’est un vrai bonheur de vous lire
Le rire est plus grave,oui,mais doit-il être plus prudent?J’espère que non,sinon,ces fous auraient un peu gagné,en quelque sorte!!!!
Et pourtant… Le rire doit être prudent, parce que rire d’un plus faible peut être meurtrier (par exemple) ; le rire est une « arme », aussi, à manier avec précaution.
Oui JJak a raison, vous nous donnez matière à réflexion…Je comprends Chantal, et je vous comprends.
J’ai envie de rire de ce que je veux avec qui je veux et quand je veux… il est vrai peut-être que c’est parce que je n’ai pas pour habitude de rire de plus faible… vous avez raison…
Rire est vraiment une arme. Mais la prudence… ne doit-elle pas venir des deux partis ?
Si untel ou untel ne me fait pas rire, je ne le fréquente pas, c’est tout !
Vous savez ça me rappelle un jour (il y a bien 15 ans de ça) un auditeur a appelé à mon boulot pour insulter le programmateur (sur FIP) simplement parce-qu’il ne supportait pas la musique orientale
-« avec toutes les bonnes musiques françaises que nous avons, c’est scandaleux.. »
…(FIP à Marseille, auditeur FN probablement…). Calmement et avec un « chouilla » d’humour je lui ai juste dit de changer de station de radio et lui ai rappelé que sur FIP nous passions des musiques du monde entier et qu’il allait se ruiner en note téléphonique.
Il m’a raccroché au nez… Pas grave, personne n’a tué personne, il écoute ce qu’il veut et FIP reste fidèle à son programme toujours autant hétéroclite musicalement !
Bonne continuation à tous et à vous M Maester qui nous permettez de réfléchir…
Rire avec, oui, c’est bien l’idée. Et l’envie. Le rire peut être aussi un merveilleux langage universel.
Un ami m’a fait une remarque que je tiens à partager avec vous.
Il a été très agréablement surpris par le comportement des gens pendant ces événement. En ces temps de crise où on patauge dans la bouillasse, on pourrait s’attendre à ce que les gens soient amorphes et épuisés. Et bien non.
Même pendant les attentats, souvenez vous de ce jeune musulman qui a été planquer des juifs dans ce supermarché. Souvenez vous des journalistes qui faute de pouvoir faire mieux ont filmé ce qui se passait. Souvenez vous des gens qui ont acheté Charlie Hebdo même s’ils n’aimaient pas son contenu. Souvenez vous des millions de personnes qui ont manifesté pour dire leur tristesse et leur colère contre cet acte de violence. Plus récemment, quand un cimetière juif a été profané, souvenez vous des lycéens issus du lycée des profanateurs qui sont allés manifester pour dire leur colère et leur tristesse face à cet acte.
Vous comprenez? Peut être vous faut-il un rappel historique.
En 1930, même condition de crise. Et ce qui se passait en Allemagne, ce qui arrivait aux juifs, presque tout le monde s’en foutait.
Aujourd’hui, les gens s’indignent. Stéphane Hessel est mort, mais son message est passé. Les gens sont dans la gadoue économique, mais ils s’indignent. Mais ils ne se laissent plus marcher dessus. Et ça c’est merveilleux. :-).
Je dirais même, cette attaque et cette manifestation, ça a été un sacré réveil. Ca va discuter dans tous les sens, ça va peut-être faire beaucoup de bêtises, mais ce qui est sûr, c’est que la période endormie est finie. Les gens pensent, les gens agissent. 🙂
Il faut être attentif pour que ce réveil ne soit pas seulement momentané.
Avez-vous dessiner notre chère soeur avec un accoutrement « Charlie power » ? 😉 elle aussi est Charlie et elle l’a toujours été non?
Elle est certainement Charlie dans la communion qui nous a réunis.
Pour moi tout le monde s’est déjà bien rendormi hélas…
Comme l’a écrit Charb dans son « Petit traité d’intolérance,
« Mort aux radins de l’amour »
Et comme il s’avait si bien terminé ces petites pensées…
« Je crois que vous en serez d’accord, il faut empaler ceux qui gèrent leurs émotions et leurs « je t’aime » comme s’il s’agissait d’inestimables valeurs boursières. Amen »
Merci, merci pour cette émotion en vous lisant, et oui, l’esprit Charlie n’était pas « calculé » mais bien spontané et bien sincère, oui le 7 janvier nous étions tous main dans la main et oui, ça rassure… Faut arrêter de réfléchir lorsque une émotion de solidarité et d’amour nous submerge, faut l’accepter !
merci 🙂
C’est bon, c’est frais… Et c’est si désespérément vrai !!!
Se laisser porter par l’empathie et la bienveillance envers tous ces compères bipèdes, ce n’est pas un luxe mais une nécessité.
La haine et le mépris nous sont offerts comme une première dose dangereusement avilissante. Une sorte de « prêt à faire feu »… Mais l’empathie et la bienveillance exigent (parfois malheureusement) un effort de chaque instant. Une vigilance simple et naturelle.
Qu’on se revendique Charlie ou non, nous sommes tous de foutus humains, liés à jamais, quoi qu’on en dise ! J’entends encore ce grand couillon de Coppens se marrer en disant « Etre raciste c’est faire preuve d’humanisme… Car nous sommes tous de la même race, celle d’homo sapiens sapiens. Ne croire qu’en cette race-là, revient à être humaniste ! »
Merci pour vos mots et pour ceux qui ont apporté leur soutien pierre à l’édifice (c:
L’empathie et la bienveillance sont en nous. Quelque part. Il suffit de le savoir, de les reconnaître et de les mettre en oeuvre… Au début, cela demande un effort, mais ensuite, c’est de plus en plus simple. Et de plus en plus enrichissant…
Bravo.
1 mois après charlie Hebdo ce sont des meurtres à Copenhague et toujours pour le même but : frapper fort et instaurer un climat de peur pour que plus jamais personne ne puisse dessiner quoique ce soit qui puisse être interpréter comme un blasphème. Résultat, et bien maintenant ils réfléchissent à deux fois avant de publier une caricature. J’espère qu’on en n’arrivera pas là.
Je n’aurai jamais pu penser qu’on pouvait tuer pour 3 traits de crayon sur une feuille de papier.
Cela fait des siècles que l’on tue pour trois traits de crayon sur un papier, rappelons-nous de l’armistice de 1918 et du Traité de Versailles, qui a certainement contribué à la guerre de 39-45. Trois traits de crayon sur un papier.
On tue pour des idées, on tue surtout par ignorance, par bêtise et par peur de l’autre. La peur engendre la peur, qui engendre la violence. On tue pour instaurer sa domination, du moins celle des apparences. Mais c’est l’arme des faibles.
Il est triste que cet élan du coeur se soit fait après de tels drames. L’homme c’est un peu comme la botanique ; les fleurs les plus belles naissent souvent sur les plus inqualifiables fumiers. Néanmoins l’espoir est là et dans ma vie encore un peu courte j’avoue ne pas en avoir vu tant que ça. Je crois que c’était la première fois qu’une manifestation d’ampleur a réussi à me remuer intérieurement dans sa touchante spontanéité. Éclatant avec la vigueur d’un slogan le désormais célèbre « je suis Charlie » a en effet dépassé les différences, transcendé les oppositions pour redonner une prégnance au « vivre ensemble » qui a tellement du plomb dans l’aile…
J’espère pour ma part que cette brève éclaircie que l’on a pu voir se former dans le ciel de France puisse se concrétiser dans la durée et offrir un avenir moins noir que celui qui semble se profiler.
J’avoue ne pas m’être tellement posé la question d’être ou ne pas être Charlie ; je n’ai pas besoin de sentence pour me sentir solidaire. Mais je lui ai trouvé une belle résonance. Je crois que c’est un phare auquel se raccrocher mais ce qui comptait surtout c’était de voir que nous voguions si nombreux dans la même idée. C’est là que ce situe notre « identité », bien davantage que dans les réflexions cataleptiques d’un certain gouvernement. C’est avec cela qu’il va falloir compter pour éviter de sombrer dans la peur qui rend fou, dans la peur qui rend aveugle et justifie toutes les atrocités. Les ennemis autoproclamés des crayons et des dessins ignorent dans leur fanatisme toute l’horreur qu’ils peuvent déclencher. Leur aveuglement et leurs certitudes les mettent au bord d’un gouffre que nous ne connaissons que trop bien, nous pour qui l’Histoire a un sens… J’espère que les crayons continueront de parler, que les esprit tiendront fermes dans leur sentiments manifestés pour que nous ne glissions pas fatalement dans la sauvagerie bestiale.
Nous sommes déjà (et depuis longtemps) dans la sauvagerie (que je me refuse à qualifier de bestiale tant les animaux semblent finalement à l’opposé de ces folies humaines). Sauvagerie économique, notamment, puissamment, sauvagerie d’une guerre revancharde de tout un monde laissé de côté pendant trop longtemps, laissé aux mains des fanatismes qui l’utilise à des fins politiques, un monde pillé, asservi, exploité pendant des siècle et qui se réveille aujourd’hui avec des cris de haine.
Faut-il s’en étonner ?
Ce que cet élan du « Je suis Charlie » a de bon, c’est qu’il répond à cette folie par un retour à l’empathie, à la solidarité, au « vivre ensemble ». Flammèche fragile encore, qu’il nous faut entretenir, au quotidien. De cette flammèche, un grand feu de joie est possible. Ce que nous avions peut-être oublié…
Je suis bien d’accord, je crains juste que l’on finisse par basculer ici dans ce qui nous a tant marqué naguère. Et les indicateurs sont très mauvais à cet égard. La sauvagerie est bien entendu déjà là, mais elle avance encore un peu cachée, loin en effet, là où les cris ne parviennent que fort assourdis à nos oreilles. (pour ce qui est de « bestialité » n’y voyez qu’un emploi rhétorique, le règne animal a bien assez trinqué avec notre folie…)
En tout cas comme vous le dites très bien, c’est dans la main tendue que la solution se trouvera et non dans l’arrogance tranquille dans laquelle « nous » tenons le monde depuis si longtemps…
Le meilleur moyen de lutter contre la peur, est de s’aimer et de se respecter, de bouffer et de rire ensemble, c’est clair. C’est possible.
Ce qui est tragique, c’est la courte mémoire, les Chiens de garde qui ont partager leur pâtée avec les élites, et finalement on fait des gros titres sur les premières ventes de rafales. J’en ai des hauts-le-coeur.
Oui tout est possible, mais le meilleur est si difficile à atteindre, maintenir qu’il n’est visible que dans les pires cas.
C’est un travail long et difficile, mais que nous savons possible. Courage !
Oh Maître, c’est bon de lire ça…
J’aimerais tellement pencher de ce côté-ci de l’humanité…
Hélas, le temps passant, je désespère de plus en plus de la nature humaine.
J’en arrive à m’en vouloir d’être devenue maman, et d’avoir jeté ma progéniture dans cette société inhumaine…
Les jours immédiats d’Après-Charlie ont été des instants d’intense émotion. Puis la vie a repris son cours, les financiers, les terroristes, les petits chefs, les intégristes de tous bords, toutes religions, tous sexes ont refait surface… On avait presque réussi à les oublier… On ne les fera jamais disparaître.
Une naissance est toujours porteuse d’espoir (quand elle s’ouvre dans de bonnes conditions, un toit, de l’amour, de la nourriture).
La nature humaine est à façonner au quotidien, et les choses évoluent. A nous de les faire pencher du meilleur côté possible. 🙂
Réjouissons-nous du côté lumineux et humain du monde car il existe aussi !
Il vibre tout autour de nous, il suffit de ralentir le rythme et d’ouvrir grand nos yeux. Et, pour ma part, l’enfant est un merveilleux médiateur pour cette découverte !
Je n’enfile pas d’œillères chaque matin, je vous rassure… Mais je préfère donner de l’importance et du temps à ce(ux) qui le mérite(nt) à mes yeux.
Le plus dur est ne ne pas céder au dégoût et au mépris… Mais franchement, on s’aime tellement plus après !!!!
Oui, partager ce qui est beau plutôt que ce qui est moche…
Damned, ce blogue risque de ne plus avoir de raison d’être, alors.
Faire du beau avec du moche, franchement, il a toutes les raisons d’être ce blog (c;
Si à la place de « Sœur Marie-Thérèse des Batignolles », il y avait eu « Iman Rachid en Aveyron »… Il n’y aurait pas eu beaucoup de tomes 😉
Il y aurait eu d’autant moins de tomes que ma culture n’est pas musulmane.
Très émue par votre texte, cher frère…
Merci, ma Soeur O’…
Merci pour vos mots. Ils me font du bien dans cette période où la résistance est venue remplacer l’insouciance.
Vincent
Superbe Maître!
Merci !
J’ai choisi de poster ici pour vous souhaiter un Joyeux Anniversaire Maître !
Que la santé soit avec vous et vos proches
Merci msieur.